Quantcast
Channel: Shangols
Viewing all 6655 articles
Browse latest View live

Promenade avec l'Amour et la Mort (A Walk with Love and Death) (1969) de John Huston

$
0
0

vlcsnap-2012-11-21-08h39m37s229

Si vous avez envie d'ouïr de petits airs de flutiau, de voir gentes dames d'un baiser jouir et manants devant chevaliers fuir, ce film est pour vous. Si en plus vous êtes prêt à passer quatre-vingt-dix minutes avec un héros moulé dans de gros collants Phildar, vous risquez de ne pas être déçu du voyage. Par contre, si vous êtes adeptes de kung-fu ou de Bruce Willis, oui, là, il vaudra sans doute mieux passer votre chemin... On connaît l'étrange attirance du gars Huston pour la thématique de la mort (les premières minutes d'Under the Volcano suffisent à le démontrer sans même qu'on ait besoin de parler de... The Dead) et il est clair que cette période moyenâgeuse en pleine guerre de Cent Ans se révèle particulièrement propice aux variations morbides : cadavres d'animaux jonchant les plaines, pauvre quidam égorgé par des soldats un brin violents, paysans attaquant à la fourche et au burin les châteaux et leurs occupants, chevaliers transperçant d'un coup de lance ces salopiots de paysan - ou en démembrant un quand il se montre particulièrement têtu -, religieux et assimilés aimant le fouet et les actes de contrition ("Pour devenir pur avant d'accéder à la Terre Sainte, il vous faut remplir une condition - Ok, vas-y, balance - Vous devez vous coupez les parties - Je n'accepte pas la condition")... Bref, l'image a beau baigner dans un halo de lumière (on se croirait presque dans Bilitis...), les violons de Delerue ne se charger de teintes que très légèrement dramatiques, le héros frais émoulu de l'universitéêtre gentil comme une châtaigne et l'héroïne (Anjelica Huston, 18 ans et fraîche comme un coeur) être belle comme les blés, l'ambiance n'est po vraiment à la rigolade. Au delà de nos deux amants qui traversent ce monde ravagé et sanguinaire comme une étoile filante dans un ciel nuageux (cela me rappelle le nom d'un temple à Pékin... passons), peu d'échappatoire dans cette oeuvre où les hommes de religion, les aristos ou les culs-terreux passent leur temps à se déchiqueter entre eux. Les temps sont durs : un cheval que tu laisses bêtement sur un chemin ayant autant de chance de se faire voler - ou dépecer - qu'une mob que tu laisses en pleine rue dans le 9-3. On n'arrête pas de se plaindre de nos jours mais les sombres individus de l'époque semblaient aussi hilarants et porteurs d'espoir que le front de Jean-François Copé... Des temps sombres qui sont tout juste éclairés par nos deux amants, des amants dont l'amour n'a de cesse de flirter avec la mort, jusqu'au bout... Le héros rêvait de voir la mer, il trouvera l'infini de l'amour... à en mourir. Eh be.

vlcsnap-2012-11-21-08h40m05s23

C'est un peu cucul, dit comme cela, mais franchement, avouons qu'on n'est pas non plus dans les summums de la carrière du grand John... On assiste certes à un joli effort au niveau de l'ambition du projet - des films moyenâgeux dignes de ce nom se comptent sur les doigts des deux mains, sur les doigts d'une main si on enlève ceux de Rohmer... -, et au niveau de la reconstitution (costumes, décors...) mais il demeure quand même un peu ardu de se passionner pleinement pour la passion de nos deux héros un peu niaiseux. J'avoue aussi, pour être sincère jusqu'au bout, que je m'attendais à pire (sur Shangols on est un peu maso, ce n'est pas nouveau) au niveau chienlit. Oui, non, ça passe, même si on sent bien parfois l'influence un peu limite du flower power (69, cela ne s'invente pas) : nos deux héros nus dans l'herbe, puis folâtrant dans les champs comme deux gamins chahutant sur des lits en plume... Mouais. Allez, on reste dans le collector et cette petite pièce hustonienne marquera sans nul doute des points lors d'une éventuelle odyssée.

vlcsnap-2012-11-21-08h41m50s55


Convoi de Femmes (Westward the Women) de William A.Wellman - 1951

$
0
0

MV5BMTQ5NzUxNDc1OF5BMl5BanBnXkFtZTcwOTU0NzQ5Ng@@
Un trésor, tout simplement, qui sait allier la rugosité westernienne et les sentiments, l'épure et le spectacle, l'humour et le mélodrame. Tout est miraculeux dans ce film, des acteurs à la mise en scène, du scénario aux décors. L'idée de départ est d'ailleurs originale : un gars qui a fait fortune dans les confins de l'ouest engage un cow-boy pour lui ramener une cargaison de femmes, afin de marier les gusses qui s'ennuient sévère dans leur ranch. 150 gonzesses (sachant qu'il y aura un tiers de pertes, on nous prévient au départ) qui traversent le désert ricain, 3000 kilomètres de dangers divers qui vont du serpent à sonnette à l'Indien patibulaire, de l'accouchement en chariot branlant au viol par les escort-boys, de la jalousie féminine à l'éclatement de cariole, de la balle perdue à la soif ardente. A la fois délicieusement phallocrate (les nanas considérées comme un troupeau de bétail à convoyer) et presque féministe (les dames feront preuve d'un courage et d'une sagesse bien supérieure à ceux des hommes qui les escortent), le sujet est assez troublant au final : il s'agit simplement d'amener des femmes aux hommes, comme on amène la vache au taureau finalement, les deux parties étant consentantes, ce qui développe une inattendue atmosphère hyper-sexuée dans le film. Ces femmes affrontent tous les dangers... pour baiser, appelons un chat un chat. Voilà qui est bien audacieux dans le sage paysage du cinéma hollywoodien classique.

westward-the-women
Pour "compenser" cette puissance hormonale, Wellman use de la mise en scène la plus épurée possible : pas de musique, des plans longs où la caméra fait tout pour se faire oublier, un jeu mesuré de la part des acteurs (tous extraordinaires). Le sujet en lui-même est suffisamment fort pour que le cinéaste se permette d'occulter tout ce qui pourrait "faire spectacle" : les attaques des Indiens seront soigneusement laissées hors-champ, la première se terminant comme un pétard mouillé ("Houlà, mais vous êtes armés, on savait pas, on se casse, ugh"), la seconde se déroulant loin de nos yeux alors qu'on suit la bluette sentimentale de Robert Taylor avec une des donzelles. Pourtant on ne cesse d'être emballé par l'aspect spectaculaire de cette mise en scène au rasoir : une course-poursuite à cheval entre deux amoureux, une épique descente de chariot, une tempête de pluie, on en a pour son argent. Mais Wellman choisit de rester toujours du côté des sentiments plutôt que de l'aventure, et pond quelques idées absolument géniales : les femmes qui soulèvent le chariot cassé pour que leur consoeur puisse accoucher ; une liste de victimes des Indiens hurlée dans un canyon désert, où les noms résonnent comme un glas ; l'arrivée des survivantes dans une ville peuplée uniquement d'hommes, où l'ébahissement, le désir, l'admiration, la pulsion sexuelle forment un melting-pot explosif. ET enfin, l'idée qui m'a mis à genoux : une femme qui a perdu ses lunettes au cours du voyage finit par retrouver l'homme qu'elle avait repéré (d'après photo) au départ ; lui aussi porte des lunettes, et elle les lui enlève pour pouvoir le regarder à son aise : quelle meilleure définition de l'amour, condensée ici en un seul geste simple ?

cfdfdsf
Constamment provocateur et drôle, le film est comme ça : profondément sentimental, sans romantisme ou mièvrerie, attaché aux personnages (mention à Robert Taylor, qui est parfait dans le changement de son regard sur les femmes, et à son sbire japonais (en 1951 !), fou du roi très drôle), d'une douceur permanente. Sous ses airs rêches, Westward the Women est un western amoureux, comme aurait pu le réaliser le grand Budd Boetticher tout aussi bien. Comme quoi, sous la cuirasse du cow-boy se cache un coeur qui bat, c'était la considération du jour.

The Unborn de David S. Goyer (2009)

$
0
0

movie-2008-the_unborn_movie-review-dvd-new-critic-matt-willey_2Comment peut-on laisser sortir des films comme celui-là de nos jours, c'est la question qui se pose devant cette daube consternante. Je veux bien continuer à défendre le genre des films d'horreur, mais j'ai quand même de plus en plus de mal devant la somme de nullités qui nous parviennent. The Unborn est l'une des pires qui soient. Plus putassier tu meurs : Goyer recycle tout ce qui a fait le succès des films récents, enfant satanique (putain, marre des enfants sataniques, pour ma part), armoire à glace dans laquelle apparaît un fantôme, exorcisme, spectres japonais à la démarche bizarre, malédiction familiale, orphelinat crasseux, fond ésotérique, monstres à la con (un chien avec la tête à l'envers, un foetus aves des garnds yeux, un vieux-araignée, même les effets spéciaux ont l'air issus d'un vieux Carpenter), n'en jetez plus. Le pire, c'est que du coup on connaît tous les trucs, et qu'on n'a du coup jamais peur. Comme les acteurs sont en-dessous de tout, comme le scénario est un foutage de gueule complet, comme même la photo est naze, on se dit qu'il serait peut-être temps d'arrêter de regarder des films d'horreur récents et de se retaper les bons vieux Dracula de notre enfance : on avait au moins un peu les foies à cette époque.

Adieu Berthe - L'Enterrement de Mémé de Bruno Podalydès - 2012

$
0
0

adieu-berthe---l-enterrement-de-meme_422447_17988

Ca y est, Podalydès est devenu adulte, c'est la bonne nouvelle du jour. Il faut dire qu'on était un peu fatigués, depuis quelques films, de cette posture d'éternel enfant naïf face aux turpitudes de la vie, planqué dans son univers vintage entre BD et policier démodé. Même si Adieu Berthen'est pas complètement débarassé de cette tendance, il marque une vraie avancée dans la carrière du gusse, se coltinant enfin avec des thématiques un peu plus amples : la mort, la fin du couple, la responsabilité, la fidélitéà son enfance, ce genre de choses. Podalydès retrouve son style attachant, fait de dizaines de petits motifs attachants et drolatiques, de personnages gentiment décalés et poétiques, de gravité mêlée à une grande légèreté. Avec un très joli sens du détail, il dessine sans en avoir l'air le portrait d'un homme en plein désarroi, pris entre deux âges (son enfance et ses ambitions de devenir magicien), entre deux femmes (son "officielle", qu'il arrive tellement peu à quitter qu'ils décident de ne se séparer "qu'un peu plus chaque jour", et la nouvelle, à la fois attachante à mort et punkoïde), entre deux territoires aussi (le foyer conjugal et la campagne).

20089793

Tout s'articule autour de la mort de "mémé", donc, vague ancêtre que tout le monde avait oubliée, et qui va être le déclencheur d'une remise en question touchante pour notre héros (Podalydès frère, la fantaisie incarnée) : contraint de s'occuper des modalités des obsèques, de s'opposer à sa belle-mère castratrice, de gérer en même temps son couple qui part en sucette, il va achever sa course contre une malle des Indes qui va lui faire découvrir qui était vraiment Mémé Berthe, et du même coup faire le point sur ces fameuses inspirations enfantines qu'on enterre peu à peu sous les obligations de la vie quotidienne. Joli sujet, qui fait le pont donc entre les inspirations habituelles de Podalydès (la magie, l'enfance) et une métamorphose vers plus de maturité (le couple est vu de façon plus sérieuse, le poids des responsabilités se fait sentir...).

REVIEW-Adieu-Berthe-l-enterrement-de-meme-reglements-de-compte-en-famille_portrait_w532

Le film n'arrive pas à se débarasser de gros ratages, notamment dans le traitement du patron de pompes funèbres incarné par Vuillermoz, beaucoup trop grand-guignolesque pour ne pas dénoter dans le style sobre de l'ensemble, ou dans certains gags un peu lourdauds. Mais c'est dans le minuscule que le film est impeccable : un croque-mort en panne sur la route et qui porte son gilet jaune, une ligne de dialogue sur la durée de vie des animaux, une Noémie Lvovsky hilarante en pleureuse éternelle, une toute petite expression d'un acteur (ils sont tous très bien), suffisent à notre bonheur. D'autant que l'émotion vraiment prenante qui monte peu à peu de cette fantaisie mélancolique joue elle aussi sur le presque rien : Podalydès n'est pas un démonstratif, son film est modeste, doucement poignant (les dernières scènes, le monologue auprès du cercueil, la variété française traitée comme une comédie musicale, les scènes de couple avec Lemercier, les décrochages trash des dialogues), très crédible malgré le ton toujours fantaisiste et décalé de l'ensemble. On en ressort touché, ce qui ne nous était pas arrivé dans le cinéma de Podalydès depuis Liberté Oléron (je suis un défenseur du film, contre mon gars Shang) : satisfaction.  (Gols 19/09/12)


vlcsnap-2012-11-25-17h04m01s4

Liberté Oléron nous avait divisés, Adieu Berthe nous réunit - my colleague and I - : c'est beau le cinoche. On retrouve les Podalydès brothers dans un ptit film truculent comme ils savent encore parfois les écrire avec un trio d'acteur très attachant ; belle idée (toute truffaldienne) que celle de nous montrer cet homme entre deux femmes en évitant tout manichéisme : il n'y a pas la méchante amante d'un côté et la douce femme de l'autre mais deux personnages avec leurs qualités et leurs défauts ; forcément cela rend la vie difficile pour notre héros qui, tout en devant enfin assumer son rôle d'adulte (l'enterrement de mémé, l'éducation de son fils...) garde en lui une évidente part d'adolescence (la difficulté toute rohmérienne de faire un choix), voire d'enfance (la magie allénienne : quitte à vouloir faire le mariole en plaçant des références, autant y aller à fond) ; l'ami Denis P. est d'ailleurs sur sa trottinette comme un équilibriste sur un fil : il peut certes retomber dans ses travers enfantins à tout moment mais continue d'avancer sur la route de l'âge de raison.

vlcsnap-2012-11-25-17h04m43s174

Malgré une thématique funèbre, le ton du film demeure relativement léger, souvent drôle (Arditi en free lance - déjà prêt à assumer sa sénilité ; Lemercier se lâchant dans le cimetière ; Noémie Lvovsky aussi chagrinée qu'une militante de l'UMP ; Bruno P. en bel ersatz d'Edouard Baer ; Denis P. dont la ressemblance physique avec Claude Berri est saisissante - oui, bon, rien à voir avec la choucroute, j'avoue) et se déguste plaisamment de bout en bout. Quelques creux dans le rythme, quelques facilités, oui avec le personnage de Vuillermoz (Twilight / toilette, urne funéraire / thermos... une fois c'est rigolo, deux fois moins), mais cet Adieu Berthe a suffisamment d'originalité et de cocasserie toute podalydienne (je me comprends) pour divertir avec des thèmes enfin plus "matures"... Réconciliation. (Shang 25/11/12)  

vlcsnap-2012-11-25-17h08m45s21

The dark Knight rises (2012) de Christopher Nolan

$
0
0

vlcsnap-2012-11-26-08h54m04s103

Rien de tel parfois, un bon dimanche soir, qu’un film (un peu long) du dimanche soir. Nous voilà donc replongé pour la énième fois dans les entrailles de Gotham pour un film de Nolan non point réellement « crépusculaire » (ça change, on pensait ne pas pouvoir utiliser d’autres adjectifs pour décrire les différents épisodes de la saga) mais exposant en plein jour les bonnes vieilles dérives « populistes » : ben oui, le peuple, généralement, on s’en fout, mais dans Batman tout le monde s’en proclame ; il y a le très méchant qui a piqué le masque d’Anthony Hopkins dans Le Silence des Agneaux qui saccage Wall Street, éructe avec sa poignée de mercenaires qu’il faut que le peuple reprenne son bien mais est prêt tout autant à le sacrifier, ce peuple …  rien que pour embêter The Bat : il a la voix de Dark Vador et se conduit de façon résolument obscure mais attention le vrai méchant, qui cache bien son jeu (un élément de réponse en bas de votre écran : il est déguisé en quiche) est peut-être caché dans son ombre… (le pire retournement de situation depuis longtemps, bref). Il y a ensuite la perfide Catwoman qui aimerait se faire passer pour une robinedesboisarsènelupine et comme elle est habillée en cuir, on est prêt à tout lui passer… Elle se révèle tout de même très égocentrique, la pépette (c’est surtout sa petite gueule, qu’elle a certes joli, qui l’intéresse), et  même si elle semble prôner certaines idées piquées au programme de Mélenchon - elle cherche un programme informatique qui remettrait tous les compteurs de tous les individus à zéro : l’égalité des chances, c’est beau -, po facile de lui faire vraiment confiance.

vlcsnap-2012-11-26-08h56m34s76

Enfin, il y a le Bat, le justicier fatigué, déprimé, tout foutu physiquement mais qui garde bon fond : en cas de gros coup dur, il serait encore capable de sortir de son trou pour sauver l’humanité ; mais de façon purement anonyme et désintéressée, entendons-nous bien. Le masque, c’est po vraiment pour imiter la chauve-souris, c’est surtout par pure humilité, un héros n’étant après tout qu’un être qui se conduit humainement avec les plus faibles… (Le Bat a prévu de revendre sa batmobile et sa batmoto à une fondation une fois qu’elles auront été taguées par un type de la rue) ; Nolan, d’ailleurs, ne fait jamais trop dans la dentelle pour illustrer ses propos : quand il parle d’un policier qui enveloppe d’un manteau un petit nenfant effrayé (voilà qui sont les vrais héros d’après le Bat…), il montre dans la seconde qui suit un policier qui enveloppe d’un manteau un petit nenfant effrayé (au cas où le public aurait pas compris : la théorie, la pratique). Notre ami cinéaste semble en avoir terminé avec les scénars gentiment alambiqués (ai préféré haut la main le précédent opus de la série), ce Batman-là laissant quand même peu de place aux doutes, à la réflexion, tant les personnages suivent une ligne clairement définie dès le départ (faisons l’impasse sur la quiche, c’est dans l’intérêt de tous…). Sinon, ouais, les scènes d’action turbinent, la musique martiale et ronflante d’Hans Zimmer (il a dû en fracasser de la peau de tambour pour faire son « score ») assomment et l’on sait enfin qui est le fils légitime de de notre héros : Catwoman + Batman = Alain Chabat… Pardon, on sait enfin qui est vraiment Robin : ça sent la suite en forme de buddy movie… On se lèvera pas forcément très tôt pour y assister.

vlcsnap-2012-11-26-08h56m00s236

L'Age de Cristal (Logan's run) (1976) de Michael Anderson

$
0
0

vlcsnap-2012-11-27-09h49m36s42

vlcsnap-2012-11-27-09h50m48s30

Je gardais un souvenir tout frétillant de la série découverte au siècle dernier (voir plus) et, infatigable petit curieux cinématographique, je me suis dit, tiens, il existe un film ?! La curiosité n'est pas toujours récompensée, on l'a déjà dit... Pourtant, à la vision des dix premières minutes de cette oeuvre S.F. vintage, on continue de frétiller, en se disant que la généralisation des mini-jupes, c'est quand même pas mal, tout comme l'invention des jupes fendues jusqu'aux aisselles ; quelle belle jeunesse verte, rose, rouge qui baise à tout va ! Il existe même, au sein de cette ville aux allures de centre commercial, une boîte à partouze de très bon goût où vous êtes accueillis à bras ouvert par des éphèbes et des nymphes dénudés et dans laquelle, bizarrement, les gens se déplacent  tout d'un coup, au ralenti (...!). Certes, dans ce monde du 23ème siècle, il faut obligatoirement mourir à 30 ans mais on n'a rien sans rien... Bien sûr, il existe des résistants dont fait partie la chtite Jessica, des résistants qui portent autour du cou un signe distinctif très discret, une énorme croix égyptienne en argent massif... Notre amie Jessica se méfie d'un bellâtre, Logan, qui ressemble à Clo-clo à 16 ans et qui a pour métier de tirer à vue sur tous les gars qui ont la malencontreuse idée de vouloir s'échapper de ce paradis du queutard. Le Logan reçoit d'ailleurs pour mission de chercher les éventuels fuyards dans un lieu prénommé le Sanctuaire et sympathise avec la Jessica dont il sent l'esprit rebelle...  Nos deux gars vont-ils s'annihiler ou l'amour va-t-il transcender la crainte qu'ils ont l'un envers l'autre ? La seconde option part de loin favorite...

vlcsnap-2012-11-27-09h51m29s215

C'est rigolo tous ces décors "style boîte disco", ces effets spéciaux avec des maquettes construites à partir d'éléments piqués dans des boîtes de Playmobil, ces multiples petits bruits zigouigouitants à tout bout de champ, ces costumes en tulle qui se soulèvent au moindre froufroutement... Nos deux fuyards vont traverser de multiples mondes (sous-sol d'usine, grotte gelée avec un personnage sûrement recalé au casting du Magicien d'Oz, un Washington envahi sous le lierre, une baraque squattée par des chats et un Peter Ustinov pas au meilleur de sa forme...), émettre des doutes dans un premier temps sur les joies du camping - oh y'a des pierres sur les routes et des lézards, burk (De vrais Shanghaiens découvrant la brousse), puis s'émerveiller de cette nature si étonnante malgré tout (regarde ce gros truc rond qui chauffe... Putain Logan, c'est le soleil, sors un peu de ton trou). Le gros problème au-delà du kitschissime de la chose demeure le côté niaiseux des dialogues entre ces deux êtres qui redoubleraient en classe de C.P. Ok, ils sortent d'un paradis aseptisé et ont un quotient intellectuel au même niveau qu'une plante en plastique en pot... Mais bon, c'est pas une raison pour prendre pendant deux heures le spectateur pour de la guimauve en barre... Du coup, on s'ennuie quand même pas mal, même si on note ici ou là quelques petits effets esthétiques bien sentis (je suis un grand fan du lierre) et une bien jolie morale : vieillir c'est chiant (t'as des cheveux blancs, des rides et tu sens la pisse de chat), mais c'est mieux que mourir trop jeune, par exemple. Rien de plus beau que la nostalgie ? Mouais, pas sûr, mes amis...

vlcsnap-2012-11-27-09h51m16s94

LIVRE : Jean Renoir de Pascal Mérigeau - 2012

$
0
0

jean_renoir_pascal_merigeauUn livre-somme comme je les aime parfois, surtout quand ils abordent la biographie d'une de mes idoles. Certes, les quelques 1000 pages format A2 remplies de caractères police 4 peuvent quelque peu effrayer au départ. Mais une fois qu'on plonge là-dedans, on reste passionné par la prodigieuse précision, la faramineuse documentation et l'ambition immense de Pascal Mérigeau : il s'agit pour lui de lutter contre la "légende Renoir", c'est-à-dire aller fouiller derrière la façade iconique mise en place par les Cahiers du Cinéma, Truffaut en tête, et par Renoir lui-même qui, avec ses mémoires rédigées sur la fin de sa vie, a habilement réécrit toute sa carrière en traitant la vérité par-dessus la jambe. Il en résulte une bio souvent à charge, assez violente contre la maître quand il s'agit de démonter quelques a-priori mensongers : Renoir de gauche ? Oui, quand ça l'arrange, mais aussi frayant avec la famille Mussolini ou volontiers antisémite quand il vaut mieux être du côté du manche. Renoir intransigeant dans ses choix de mise en scène ? Plutôt un gars qui sait à merveille s'adapter aux contingences, quitte à sacrifier ses ambitions artistiques en cours de route. Renoir inventeur de la Nouvelle Vague ? Jamais artistiquement, mais plutôt amicalement, et par défaut, parce qu'il trouve dans cette bande de jeunes loups ses seuls admirateurs dans les années 60.

Mérigeau se livre donc à un véritable déboulonnage de statue, et on lui sait gré de remettre ainsi les pendules à l'heure. D'autant que la figure de Renoir en ressort beaucoup plus humaine : c'est celle d'un artiste tellement soucieux d'être apprécié qu'il se range toujours à l'avis de son interlocuteur, d'un cinéaste tellement désireux de travailler qu'il peut jongler avec les accidents de tournage sans problème... et en tout cas d'un scénariste génial, profondément humain et en empathie avec ses personnages. La fameuse formule "tous les personnages ont leur raison", le goût de la technique et de l'expérimentation, les jolies tentatives de la période muette (le gars n'aime pasLa Fille de l'Eau, et il a bien tort), la gloire de la période "Gabin", la vie trépidante durant la guerre et les films américains, le fiasco financier des dernières années, tout est bien à sa place, agrémenté des 499000 anecdotes afférentes. C'est tout le siècle qu'on traverse, et on se met à rêver de ces rencontres avec Orson Welles, Céline, Chaplin, Kennedy ou Giono. Mérigeau n'écrit pas très bien (sa méfiance des parenthèses, certes peu partagée sur ce blog, l'oblige à des circonvolutions de langue bien dommageables), sacrifie souvent la finesse de l'analyse à la froideur des chiffres, et du coup échoue à vraiment nous mettre en osmose avec son "personnage" ; à la fin de ce pavé, on n'est pas très ému, on est renseigné mais pas touché. Mais c'est pas si grave : on a là le livre ultime sur le bon maître, qui le fait descendre un peu de son autel tout en maintenant vivant le génie du bonhomme.

Renoir est tout entier ici

La Cible humaine (The Gunfighter) (1950) de Henry King

$
0
0

vlcsnap-2012-11-27-22h10m34s132

Dans tout bon vieux western classique, il est question d'attente. Peck is Jimmy Ringo, le tireur le plus rapide de l'ouest et c'est sa malediction. Il pourrait être ici question de fusillades, de moult réglements de compte, de dizaines de cadavres faisant des roulés-boulés dans le sable ; il n'en sera rien. Ou tout du moins en cinq minutes ce sera plié. Un jeune con provoque Greg dans un bar, fait le mariole, dégaine, perd un morceau de son coeur. Les trois frères du jeune con partent à la poursuite de Greg, celui-ci les attend au tournant, l'un d'eux perdra un doigt, la messe est dite... Pauvre Peck éternellement précédé par sa réputation (toujours un gazier avec trois poils à la moustache qui se prend pour un ours et qui veut avoir la gloire de le descendre dans n'importe trou du far-west) et éternellement suivi par des cow-boys, animés par la vengeance, couillons comme des huîtres. Notre gars n'aspire qu'à une chose, boire pénard son whisky au comptoir et revoir celle qu'il a bêtement quittée il y a huit ans, celle avec laquelle il a eu un enfant... Malheureusement, sa (mauvaise) réputation le précède et le Greg devra attendre et encore attendre avant que la belle se décide à lui adresser deux mots... King n'est pas un manchot pour mettre en scène cette fameuse attente en faisant graviter autour du Greg, qui ronge son frein, une poignée de personnages, véritable concentré de l'humanité : les voyeurs, bien sûr, enfants ou adultes, qui assistent en spectateurs au non-spectacle de cette légende vivante, l'éternel jeune abruti du coin, les rombières de service, le shérif droit dans ses bottes (impec Millard Mitchell), le type à la coule auquel on paye volontiers un whisky, le vieux vengeur bête et têtu comme une teigne, l'assistant shérif trouillard comme une taupe, la bonne amie toujours prête à tenter l'impossible ou encore l'éternelle aimée qui hésite entre deux hommes : celui qu'elle a aimé et qui l'a fait tant pleurer et celui qu'elle a fait et qu'elle ne veut pas pleurer. Ouais Greg, tu veux te ranger, mais tu as vu la meute d'assoiffés qui suivent ta trace...? Greg, ira jusqu'au bout de l'attente, jusqu'au bout de sa chance, jusqu'au bout de sa récompense... Mais quand on est l'homme le plus rapide de l'ouest, il faut toujours aller de l'avant : quand on commence à se laisser rattrapper par les sentiments ou par un quelconque espoir, il faut se méfier de la balle qui est cachée derrière...

vlcsnap-2012-11-27-22h12m03s72

vlcsnap-2012-11-27-22h11m53s242

Western d'attente mais aussi vaillant et solide que la moustache d'un Peck au top de sa forme ; il n'a guère besoin de lever un sourcil pour laisser le charme agir, n'a guère besoin de lever le coude pour laisser une balle partir. Prêt à tout pour qu'on oublie sa (fameuse) réputation, le Greg est las des cons qui l'entourent où qu'il aille. Il voudrait une femme, putain, son gamin et un ranch et qu'on le laisse paisible... Filmé en contre plongée au début du film alors qu'il domine des hommes à ses trousses, Peck finira à genoux, devant son gamin : comme pour montrer qu'il cherche maintenant à revenir sur terre et veut laisser la légende au vestiaire. Notre homme qui tue pour sauver sa peau - face aux provocations des autres - aura bien du mal à se dérider ; on pourra apercevoir néanmoins durant une micro-seconde l'homme avoir un sourire ; mais le temps est un joueur avide qui gagne à tout coup c'est la loi du far-west et notre homme, qui passe pourtant le film le regard accrochéà la pendule, risque de ne pas faire le poids s'il s'oublie... Peu de gun, peu de fight, mais un grand western porté un Peck décapant.

vlcsnap-2012-11-27-22h12m47s8


Bourbon Street Blues (1979) de Douglas Sirk

$
0
0

vlcsnap-2012-11-28-21h27m07s62

Pointu et nécessaire jusqu'au bout des ongles sommes-nous avec cette ultime oeuvre sirkienne sous influence fassbinderienne - il fait l'acteur, le bougre - et tenesseewilliamesque. Ambiance glauque dans cette maison de passe... de bas-étage, forcément, où s'affrontent une locataire alcoolo et mythomane et une tenancière bas de plafond. Celle-là, fortement éthylisée, raconte des histoires alambiquées (superbe tirade sur les cafards volants... Je vais m'en inspirer pour ne pas payer mon loyer à la fin du mois - des scolopendres, des scorpions, des cafards rhinocéros, passe encore... mais un crabe grand comme ma main dans la chambre. Qui pourra m'expliquer rationnellement comment il a fait pour monter les marches ? Je ferme la parenthèse), se lance dans des justificatifs tirés par les cheveux (ses origines nobles, sa plantation de caoutchouc au Brésil) pour tenter de faire oublier son retard dans le paiement de son loyer pendant que celle-ci demeure terre à terre et ne réclame qu'une chose : son fric. Survient alors dans la chambre, plus dépenaillé qu'un clodo, Herr Fassbinder, écrivain (je ne dis rien de la chute... ou plutôt de la "cerise" sur la gâteau) sans le sou et sans succès qui tance la proprio : oui, sa voisine de palier lui raconte des salades, oui elle ment surement au même rythme qu'elle enquille les whisky et alors putain, est-ce condamnable de vouloir vivre, survivre en faisant preuve d'imagination et en lâchant quelques affabulations ? Il pose la question, juste...

vlcsnap-2012-11-28-21h30m28s62

vlcsnap-2012-11-28-21h27m56s77

Au-delà de la présence du Rainer Werner, le film semble "imprégné" - comme on peut l'être avec du rhum après un long séjour à Madagascar - de l'oeuvre du cinéaste allemand : bouteilles vidées en un gloups, jeu avec les miroirs, longs plans séquence sans dialogue, bien difficile de reconnaître parfois dans ce petit bijou des bas-fonds l'esprit ultra dramatico-romanesque du grand Sirk. Cela participe forcément au charme de ce court, un court enveloppé d'une petite musique bluesy à l'harmonica du meilleur effet. Dommage que l'état de la copie ne puisse permettre de pouvoir réellement apprécier à sa juste valeur le travail sur la photo de Michael Ballaus mais ne faisons point la fine bouche après avoir pu découvrir ce dernier râle cinématographique très "inspiré" de l'ami Douglas... On peut encore trouver de belles raretés filmiques sous des pierres comoriennes... enfin surtout, que ferait-on sans l'équipe de KG ?...

vlcsnap-2012-11-28-21h28m39s252

C'est quoi ce Sirk ? Tout est

Nausicaa (1970) d'Agnès Varda

$
0
0

vlcsnap-2012-11-30-15h54m08s64

Véritable rareté dans la filmo de Varda, Nausicaa nous parle de la Grèce et de ses problèmes non point financiers à l'époque mais purement politiques, mon Colonel. Varda varie comme elle sait si bien le faire interviews d'exilés, d'artistes grecs et de quidam français ayant visité la Grèce (un ciel absolument superbe... Pour le reste, vous savez, moi la politique...), mini sketches allégoriques (plus ou moins réussis) dont l'un notamment sur la démocratie bafouée par les colonels ass-ass-ins, ou encore mise en scène autobiographique de son propre passé et de celui de ses parents... Tout cela s'entremêle sans que la voix off de la miss Varda n'ait besoin de se faire trop entendre, la cinéaste ne prenant jamais son spectateur pour une tuile. On retrouve avec plaisir "en guest star" Depardieu en sauvageon hirsute (un épisode découvert dans Les Plages d'Agnès) voulant voler les livres d'art de la jeune Agnès (interprétée par la fraîche France Dougnac...) alors étudiante au Louvre ("les jeunes veulent la révolution mais dès qu'on s'attaque à leur petite possession"... Ah sacré Gégé), la réelle Agnès encore toute jeune (elle n'a jamais vieilli, soyons franc) interrogeant un Grec qu'elle avait logé chez elle par le passé ou encore Myriam Boyer, la collocataire d'Agnès, dans son tout premier rôle... Moins anecdotique, l'hommage protéiforme et sincère d'Agnès pour ce pays dont son père est originaire (et dont il a tenu sa fille éloignée).

vlcsnap-2012-11-30-15h54m32s48

vlcsnap-2012-11-30-15h54m59s60

Tout ce qu'elle sait sur la Grèce, elle le doit à ses lectures, à ses études archéologiques et artistiques et à la rencontre avec ces exilés souffrant du "mal" du pays... Si le film prend volontiers un tour politique (il dénonce les tortures et les camps de concentration mis en place durant cette dictature des Colonels... il fut d'ailleurs interdit par la France en son temps pour ne pas heurter ce cher partenaire économique qu'était la Grèce), il tend sur la fin à verser dans la romance... La jeune Agnès tombe dans les bras de son hôte grec qui la quittera après un nuit d'amour... Métaphore voilée sur le fait d'avoir un jour voulu tourner la page sur ses origines ou réalité pure (dont vient justement, en grec, le prénom Agnès...) et dure sur ses premières amours ?... Qu'importe, l'essentiel est bien d'illustrer tous les liens qui l'attachent à ce pays, un pays européen tombé dans la dictature sans que cela ne semble véritablement émouvoir ses voisins. Film politiquement engagé qui permet à la Varda d'expérimenter tous ses talents de "cinéaste patchwork" ; la cinéaste utilise en effet moult moyens d'expression narratifs qui tendent tous vers un même but : faire une déclaration d'amour à ce pays souffrant qui aurait pu être pleinement le sien. A découvrir, forcément... Et si vous voulez avoir une ptite dose supplémentaire de Grèce, comment ne pas conseiller l'oeuvre-somme d'un fidèle ami de Varda, L'Héritage de la Chouette du regretté (et immense) Chris. Marker.

vlcsnap-2012-11-30-15h55m53s79

Tout agnés va

Un Tir dans la Tête (Tiro en la Cabeza) de Jaime Rosales - 2008

$
0
0

Tiro_en_la_cabeza_blog
Amoureux du précédent film de Rosales, La Soledad, c'est avec confiance que je me jetai sur ce nouvel OVNI. Mon enthousiasme se nuancera cette fois-ci quelque peu. En termes de radicalité et d'expérimentation, Tiro en la Cabeza n'a rien à envier à son glorieux aîné : le film est une sorte d'observation à distance des faits et gestes d'un homme, dont l'identité et les actes resteront très mystérieux jusqu'à la fin. Comme si un caméraman embusqué (détective privé ? flic ? reporter ?) se contentait d'observer et de filmer "objectivement" cet homme en vue d'une analyse ultérieure, cette analyse se trouvant au final être à notre charge, nous spectateurs. Pas de dialogues, pas de trame, des plans "fonctionnels", longs et rudes, les 9/10 du film étant consacrés à des actions quotidiennes absolument banales (le gars discute avec ses potes, se couche, fait l'amour avec une femme de passage, mange, etc.). L'important réside dans le dixième restant, où on découvre que notre proie est moins banal qu'il n'y paraît : il abat deux jeunes gens dans une voiture et finit par enlever une femme et l'abandonner en pleine forêt. Membre de l'ETA (le machin se passe au Pays basque) ? Terroriste ? Truand en cavale ? Simple petite frappe dépassée par les évènements ? On ne saura strictement rien de plus que ce que la caméra enregistre de loin, et c'est à nous de nous faire notre propre cinéma façon Rear Window.

tiro-en-la-cabeza-ion-ninos
On applaudit devant l'audace de la tentative, le courage des intentions, l'absence totale de concession de ce film âpre, monotone et mystérieux. Rosales a un principe et s'y tient, même s'il teinte sa "mise en scène" de subtilités inattendues (le témoin-cameraman s'avère moins objectif que prévu, se livrant à des champs-contre-champs, des travellings et autres mouvements de caméra ou de montage qui montrent qu'il y a bien un cinéaste derrière ça). Mais pour cette fois, on reste un peu dubitatif quant à la finalité de cette aridité formelle : on comprend au bout de deux minutes le principe, mais on n'a pas très envie de s'infliger ces 80 minutes-là, qui ne disent finalement pas grand-chose, ni sur le monde, ni sur le personnage, ni sur la mise en scène. Au bout du compte, un peu exsangues, on ne voit pas pourquoi on nous a infligéça, si c'était pour raconter aussi peu de choses. Un film qui a raison d'exister, souvent brillant, toujours radical, mais qui n'apporte pas grand-chose au schmilblick.

tiro-en-la-cabeza-ventana

Shame (2011) de Steve McQueen

$
0
0

19869833

Hungerétait tout sauf honteux, Shame laisse méchamment sur sa faim... Bien difficile de ne pas envisager ce film comme une adaptation (tardive) d'un bouquin de Bret Easton Ellis : il est question d'un jeune type friqué, beau, solitaire, addict au sexe ; malheureusement, outre le fait que cela ait un méchant petit air de "déjà lu", la démonstration de McQueen tourne un peu à vide... On comprend bien que le gars Michael Fassbender, à l'image du virus qui s'est propagé dans son ordi, est un grand malade du sexe (consommation effrénée de revues porno, de sites porno, de putes porno, de boîtes porno (ah homo, une ptite variation), d'appart porno (et un threesome, un)...) et que sa chtite sœur qui vient squatter chez lui n'est guère plus stable mentalement vu les multiples cicatrices horizontales sur son bras droit, une vraie squaw... ou secouée - c'est selon. Au rayon sex and blood, Shame est particulièrement bien achalandé et il faudrait être aveugle pour ne pas voir que nos deux héros modernes sont malheureux comme la pluie ; là où McQueen joue plus les ptits malins, c'est en laissant dans le flou tout un pan de son histoire comme pour mieux faire cogiter son spectateur... sur des détails dont finalement il se brosse (quel est le taff de Fassbender, hein ?, quel est exactement le traumatisme dont lui et sa sœur ont été victimes petits - on comprend bien que cela doit être en relation avec leurs parents restés en Irlande mais quoi exactement (des viols, des maltraitances physiques, des repas exclusivement constitués de pommes-de-terre ?...), quel est vraiment le sens de cette fin toute bécasse genre, "je sais que je suis malade mais c'est plus fort que moi, voilà, voilà, j'y peux rien..." ou plutôt "attend mec, maintenant je contrôle"... ?)... Au niveau de sa trame principale, par exemple, le gars enfonce bien le clou (métaphore et euphémisme, bien sûr) : Fassbender surconsomme du sexe mais n'est po capable, le bougre, de sentiment (sa plus grande relation a duré quatre mois, bouhhhh...); pour preuve sa relation avec sa sublime collègue (Nicole Beharie - et voilà, je suis encore amoureux...) : il ne craque pas le premier soir (bravo) mais ne peut s'empêcher de l'emmener dès le lendemain dans une chambre d'hôtel ; séquence passion, sensualité, émotion mais voilà c'est trop pour notre Michael a-sentimental et c'est la biroute, pardon la déroute. Trop dommage. Et sinon ?

19812107

Alors voilà, bien facile de descendre ce Shame sur le fond (comment dire, une resucée ellisienne ?... Mouais) mais sur la forme McQueen est quand même loin d'être un manchot : cadres millimétrés, plans séquences calibrés, scènes de coucherie toujours filmées à la bonne distance et joliment montées (comme Fassbender d'ailleurs, si je peux me permettre un aparté limite...), aisance évidente dans la mise en scène, belle ambiance cotonneuse... Nan c'est vrai que c'est indéniablement du beau boulot. Rien que cette première séquence, montée en plusieurs temps (Fassbender mate une gorette dans le métro), montre toute la facilité du gars : un montage en champ / contre-champ somme toute ultra basique mais on ne peut s’empêcher de ressentir tout le "fluide", la connivence qui passent entre ces deux individus ; McQueen sait également nous gratifier de quelques jolis "petits moments suspendus" de toute beauté (Carey Muligan, la soeur de Fassbender, se lançant dans une version ultra minimaliste de New York, New York ; Fassbender filmé in extenso lors de son footing nocturne dans les rues de Manhattan ; le plan-séquence de la scène de la biroute qui monte joliment en puissance avant le... ooops...)... Bref po à dire, avec la ptite musique qui va en plus toujours bien, bel ouvrage, oui bel ouvrage... Un peu vain, quoi. Certains ont crié au chef-d’œuvre, d'autres à la daube, eh ben quitte à passer pour un tiède du modem, j't'y mettrai deux ptites étoiles. Rien de honteux, c'est ça, et McQueen a démontré qu'il en avait quand même sous la pédale... Je reste confiant pour son 3ème opus, voilou.   (Shang - 11/04/12)

19869834


Assez d'accord avec mon camarade. Peut-être un peu moins sévère, mais d'accord (cela dit, et pour titiller le Shang, je ne saisis pas la différence franche entre ce cinéma-là et celui de Hal Hartley... coup bas). C'est quand même très joli, ces amples mouvements de caméra, ces travellings longuissimes le long de rues kubrickiennes, cette photo lêchée jusqu'à la déréalisation, et ma foi, si ambiance à la Easton Ellis il y a, eh bien je suis client : j'adore cet auteur, qui ne me paraît d'ailleurs pas beaucoup plus profond que botre compère McQueen, et ce dernier réussit parfaitement à rendre ces ambiances effectivement assez proches entre superficialité formelle et douleur enfouie. C'est vrai que le scénario est un peu balourd, moi j'aurais carrément enlevé le personnage de la soeur : ça nous aurait évité, et d'un, la version de New-York New-York assez naze, et de deux, les gros traits psychologisants ("mais tu accumules les nanas alors que tu sais même pas aimer ta soeur", c'est ça la vraie "shame" du titre, Mc Queen serait-il un sombre réctionnaire coincé ?). Pareil pour cette scène où on découvre que le gars ne peut plus bander dès lors que le sexe n'est plus tarifé ou qu'il s'accompagne de sentiments : c'est épais.

942294-1118448
Cela dit, je le répète, j'ai trouvé le film envoûtant, tout en atmosphères, et quand Mc Queen ferme un peu sa gueule de moraliste, il parvient à atteindre une ambiance mystérieuse, pleine de non-dits, qui marque des points. Fassbender (très bon) excelle à rendre profond un personnage qu'on ne voit pourtant rien faire d'autre que baiser, se masturber et courir. Son visage torturé, son beau corps fatigué, la sobriété de son jeu, rendent ce personnage à la fois opaque et attachant. On n'arrive pas à saisir ce qui nous fait mal chez lui, mais l'impression est bien là. Dans les séquences de sexe, effectivement excellemment mises en scène, le trouble apparaît, et aussi cette amertume toute empreinte de spleen contemporain qui fait la marque de la littérature américaine d'aujourd'hui (on pense à Easton Ellis, certes, mais aussi à McInnerney ou Delillo). Une sale tristesse, quoi. Le film, quand il laisse de côté son côté signifiant, atteint souvent une vraie beauté glaciale, et c'est déjà très précieux. Je reste confiant pour son 3ème opus, voilou.   (Gols - 01/12/12)

shame2

LIVRE : Féérie générale d'Emmanuelle Pireyre - 2012

$
0
0

123Le sujet de ce livre : Nietszche, la haute montagne, le commissaire Moulin, le baiser sur la bouche, Christine Angot, les héros, les mangas, les toilettes sèches, Tolstoï, le port du voile, le tourisme et Béatrice Dalle. Entre autres. Autant dire qu'il y a à manger dans ce livre assez hallucinant, sorte de collage pop qui brasse les anecdotes les plus banales et les sujets les plus graves dans un style incroyablement léger et original. Pireyre a rassemblé en un seul volume une somme d'articles de presse, de dossiers de fond, de faits divers de toutes sortes, de pensées de toutes obédiences, et livre une sorte de portrait en coupe de notre bonne vieille société contemporaine, à la fois société du spectacle dérisoire et terreau riche en savoirs et en pensées. Il en résulte un... roman ?... oui, appelons ça comme ça, où on passe sans arrêt du coq à l'âne, voire à la truite saumonée, dans un joyeux bordel organisé. Le titre est bien trouvé : la sensation de fête foraine, qui nous fait passer de sommets (des théories économiques sur le salaire minimum) en abysses (de pauvres photos de bottes de Robin des Bois, oui, il faut lire le truc pour comprendre), l'impression que notre regard est sollicité de toutes parts, que ce soit pour regarder de vraies belles choses ou des choses idiotes. Le livre mélange culture populaire et culture érudite avec une énergie et une maestria étonnante ; pourtant, ce n'est jamais hétéroclite : Pireyre rassemble tout ça dans une construction assez rigoureuse, en chapitres très classés (dont les titres valent à eux seuls le détour), dans un semblant de grand sérieux qui ajoute encore à l'originalité de la chose. Bref, voilà un bidule comme on ne peut que les adorer immédiatement, de l'expérimentation pure qui ne se prend pas au sérieux, du contemporain qui rigole de son propre intellectualisme. Un vrai bonheur.

Docteur Jekyll et M. Hyde (Dr Jekyll and Mr. Hyde) de Rouben Mamoulian - 1931

$
0
0

tumblr_md8l74Ubkq1qzuw9ao1_500
Le compère Mamoulian est décidément fasciné par les doubles personnalités : après Zorro, le voilà aux prises avec le mythique Docteur Jekyll et son alter-ego négatif, et c'est tout autant réussi. Le film regorge d'expérimentations en tous genres, et contient en plus un fond gentiment sulfureux bien agréable. Pour Mamoulian, cette histoire est avant tout celle d'une frustration sexuelle : si Jekyll devient Hyde, c'est parce que son mariage avec sa gorette est sans cesse repoussé par un beau-père aride, et que la coupe déborde. Cadrant subtilement et sans arrêt sur des marmites qui débordent, des éprouvettes qui gouttent ou des fumées qui s'échappent de soupapes chauffées à blanc, le cinéaste ne se gène pas pour charger son film d'une atmosphère hyper-sexuée. Le summum est atteint avec cette séquence toride où Jekyll prend la défense d'une pauvre fille maltraitée (Miriam Hopkins, la "biatch" incarnée), et où notre gars, subissant un énième coïtus interruptus à cause de cett moralité qui vient sans cesse le harceler, se retrouve obnubilé par le balancement de la jambe de la donzelle (voir image). C'est véritablement cette image qui va le faire passer de l'autre côté, et Hyde va se trouver être l'incarnation physique de cette sexualité bridée qui trouve enfin sa liberté : sauvage, libidineux, pervers, simiesque, le monstre ne cherche qu'à dominer sexuellement la pauvre Ivy ; il est vraiment le versant pornographique du sensuel Jekyll.

Dr
Mais par-delà ce message amusant, il y a les essais formels de la chose, et c'est un festival. Ca commence avec une longue séquence d'ouverture en travelling subjectif de toute beauté (surtout quand l'acteur passe devant le miroir : c'est là qu'on découvre son visage). Bon, il est vrai que ce bazar n'est là que pour l'esbroufe et ne sert strictement à rien ni pour le récit ni pour le suspense ; Jerry Lewis, dans sa version à lui, se livrera à la même technique avec autrement plus d'intelligence. Mamoulian, lui, s'amuse comme un fou avec ça, mais sans que ça n'amène rien. Il y a également de splendides fondus enchaînés, infiniment lents, qui permettent d'inscrire durablement une image par-dessus une autre, comme une obsession qui n'arriverait pas à quitter l'écran : c'est le cas de ces fameuses gambettes-balancier qui obnubilent Jekyll, mais les exemples sont pléthore et souvent à bon escient. Et puis, comble de la modernité, il y a, mais oui, des split-screensà gogo, qui eux non plus ne servent pas à grand-chose, mais amusent au moins l'oeil, ce qui est déjàça de pris. Respects aussi pour les effets spéciaux, lors des transformations de Jekyll en Hyde : gros plans sur le visage, et métamorphose en live du meilleur effet.

drjekyll193209
A part ça, eh ben c'est l'histoire classique, hein, je vais pas vous résumer l'intrigue. Notons que l'acteur, Fredric March, s'en donne à coeur joie, autant dans le tourment intérieur (et de slip) de son Docteur que dans les excentricités violentes de son Mister. Il en fait assez, dirons-nous, mais on rigole bien à le voir bondir sur des gendarmes effarés ou terroriser la blondinette de service. Le scénario n'apporte pas grand-chose au texte de Stevenson, mais c'est dansles vieux pots qu'on fait la meilleure soupe, et on retrouve avec plaisir cette bonne vieille histoire de dualité quasi-mystique. Un film qui vaut de toute façon mieux pour sa forme que pour son fond : on en prend plein les yeux, complètement gratuitement, alors youpi.

drjekyll193210

Chroniques de Tchernobyl (Chernobyl Diaries) de Bradley Parker - 2012

$
0
0

chernobyl-diaries-devin-kelley-image
Très bonne surprise que ce film qui, contre toute attente, s'avère parfaitement convaincant dans sa mise en scène. C'est devenu rarissime, de nos jours, de voir un cinéaste de film d'horreur réfléchir un peu à la forme de son film, et c'est d'autant plus agréable de tomber par surprise sur ce genre de réussite. Non pas que Chernobyl Diaries soit génial, hein, je n'ai jamais dit ça, on n'est pas chez Carpenter non plus, non ; mais quand même, Parker se frotte avec courage à une forme relativement nouvelle, et on lui en sait gré.

Chernobyl_Diares_2
On croit, dans les premières minutes, être tombé sur un énième film en caméra subjective, et on soupire. Eternellement, on regarde une bande de petits jeunes préparer hilares un voyage en Europe de l'Est, et on sait déjà qu'ils seront à la fin hâchés menus, décapités ou bouffés tout crus par une bande de monstres. Filmage amateur, hâché, que du déjà vu. Mais le film s'écarte assez vite de cette esthétique surfaite : nos petits jeunes s'embarquent dans une visite illégale d'une ville abandonnée en lisière de Tchernobyl, et à partir de là, Parker opère un subtil revirement dans le regard, dans le point de vue : la caméra, personnage central de la narration, va prendre une place assez indéfinissable. Elle est à la fois dans l'action (toujours ce filmage à l'épaule, les décadrages hystériques quand la violence arrive, comme si le cameraman était un personnage) et en-dehors, observatrice, témoin, mais en même temps subissant les mêmes peurs que les personnages. C'est vraiment intéressant : on comprend peu à peu qu'elle nous représente nous, spectateurs, en nous immergeant habilement au coeur de l'action tout en nous épargnant l'éviscération subie par ses protagonistes. La mise en scène est très habile de ce côté-là : on a peur, on panique avec les personnages, mais on reste observateur, comme un reporter infiltré en quelque sorte.

chernobyl_3
Après, pour le reste, c'est assez moyen : maigre scénario confinant même, sur la fin, au bâclé (il faudrait quand même qu'on cherche à comprendre cette terreur des Américains envers les Pays de l'Est, ça devient étrange à force), peur dans les chaussettes (trop petit budget, ce qui oblige à toujours cacher les choses, et à force c'est pénible)... Mais on peut noter tout de même, fait rarissime, que les acteurs sont bons, et que Parker utilise avec bonheur son magnifique décor : ville abandonnée, pleine de bâtiments crasseux envahis par la nature, pleine de recoins sombres et de possibilités pour faire peur ; autobus perdu en plein terrain vague, qui donne les meilleures scènes par ce côté huis-clos donnant sur le vide ; appartements ayant aboli la frontière entre civilisation et sauvagerie (très jolie scène d'attaque d'un ours au milieu d'un salon). Non, vraiment, il faut voir ce petit film, même s'il ne fait pas très peur, même s'il est un peu raciste et crétin : le scénariste (Oren Peli, l'auteur de Paranormal Activity) est épais, mais Parker est un bon cinéaste intelligent.


Les Enfants d'Hiroshima (Gembaku no ko) (1952) de Kaneto Shindô

$
0
0

vlcsnap-2012-12-07-23h39m23s60

Difficile d’oublier Hiroshima (Souviens-toi…). C’est pourtant  ce que l’enjoignent de faire les proches de l’héroïne qui a décidé, quatre ans après la catastrophe, de retourner dans sa ville natale. Tout comme le morceau de verre qui est resté« incrusté » dans sa peau, qui lui provoque des douleurs chaque fois qu’elle le touche mais qu’elle ne peut se résoudre à enlever, le souvenir tragique d’Hiroshima fait désormais partie d’elle-même. Ce retour va forcément réveiller des instants traumatiques (l’heure précise, 8h15, où la bombe est tombée, tuant sa famille, réduisant en cendres certains quartiers, mutilant des milliers d’êtres…), c’était relativement attendu, mais le désastre est, lui, loin d’être terminé… Comme le note Takako, l’héroïne, les « ondes des radiations » semblent continuer leur œuvre de destruction et on assiste à des drames en chaîne parmi les survivants : un grand-père défiguré et quasi-aveugle - l’ancien serviteur de la famille de Takako devenu mendiant - qui tente de survivre pour s’occuper de son petit-fils, une amie de Takako rendue stérile par la bombe…

vlcsnap-2012-12-07-23h37m17s92

Takako est également revenue à Hiroshima pour retrouver trois gamins : sur la quarantaine de gamins du jardin d’enfants dont elle s’occupait avec son amie, seulement trois ont survécu. Les retrouvailles ne sont pas vraiment la fête Neuneu : le premier gamin qu’elle retrouve vient tout juste de perdre son père (suite aux radiations…), le second est mourant (suite aux radiations…), le troisième va bien mais sa sœur se marie (à chacun ses drames… ). On aurait envie de dire que Shindô parvient àéviter tout miserabilisme mais ce serait comme vouloir s’obstiner à appeler une louche une « grosse cuiller » : soyons franc, on est quand même plongé toutes les trente secondes dans la misère noire et chaque note de violon est aussi destructeur qu’un archet qui n’aurait de cesse de s’enfoncer dans le cœur…

vlcsnap-2012-12-07-23h38m07s81

Ceci dit, cette œuvre est loin d’être totalement dénuée d’espoir : à l’image de cette femme stérile devenue sage-femme et tout enjouée à l’idée d’adopter le cinquième enfant d’un couple d’amis, il ne sert à rien de se morfondre sur son sort… Tout le combat de Takako va également consister à convaincre son ancien serviteur de la laisser s’occuper de son petit-fils ; l’orphelin, détruit sentimentalement, et le vieil homme, détruit physiquement, sont totalement inséparabales mais il est clair qu’il sera difficile pour le gamin de s’épanouir vu les conditions de vie que lui offre son grand-père… Est-il possible pour le grand-père de faire encore un sacrifice - l’ultime -, est-il possible pour l’enfant de se reconstruire ailleurs ?… Shindô ne nous épargne rien dans « l’escalade dramatique » mais le message final finira par laisser poindre un rayon d’optimisme… Très soignée au niveau de la réalisation (travellings discrets sur les personnages, champs-contre-champs souvent « osés », séquences - sur la fin - « filmées à l’épaule »…), cette œuvre-hommage de Shindô (disparu cette année-même à 100 ans) parvient à s’extraire des ruines de cette ville en tentant de capter l’ombre d’un sourire sur le visage de son héroïne… Bel et louable effort. Hiroshima, souviens-toi, mais un jour viendra où il faudra à nouveau regarder droit devant…

vlcsnap-2012-12-07-23h39m56s137

Argo de Ben Affleck - 2012

$
0
0

Argo-930X620_scalewidth_630
Ah le bon temps du cinéma des 70's, où pour parler politique on vous faisait de bonnes vieilles leçons accessibles à tous : d'un côté les méchants (ceux qui ne parlent pas américains) et de l'autre les Américains (qui parlent américains). Affleck aime ce cinéma schématique, et nous livre un film-hommage efficace et crétin, d'où un résultat mitigé : on lui sait gré de nous avoir fait vivre un vrai suspense à l'ancienne, de nous avoir scotchés à l'écran pendant deux heures, bouche bée et bave menaçante ; mais on aurait aimé aussi qu'il nous parle un peu mieux de notre monde, et qu'il apporte quelques nuances à son scénario. Parce que là, en sortant, à part de savoir que les Iraniens sont tous barbus, l'air menaçant, et qu'ils ne parlent pas américain, on apprend tout de même peu de choses.

Argo-Alan-Arkin-John-Goodman
Tant pis : contentons-nous d'applaudir à la redoutable efficacité du montage et du scénar, "based on a true story" mais glamouriséà mort par des auteurs survoltés : il s'agit de l'exflitration de 6 Américains prisonniers à l'amabssade canadienne de l'Iran, en pleine Révolution khomeynienne ; un spécialiste de la chose (Affleck, excellent comédien qui fait dans l'opacité eastwoodienne) monte un piège rocambolesque pour remplir sa mission : organiser un faux repérage de lieux pour un faux film mené par une fausse équipe de cinéma. Les meilleurs moments sont ceux où ce fameux film-leurre se monte, et où la comédie fait son apparition au milieu de l'austérité du film d'espionnage : John Goodman et Alan Arkin sont en charge de l'humour du film, et remplissent fort bien leur tâche : critique gentiment acerbe du milieu hollywoodien, portrait grinçant de quelques personnages, c'est très fun. Affleck est également à son poste quand il s'agit d'envoyer du suspense : tout le dernier tiers, quand l'opération commence concrètement, est super efficace, le gars ajoutant rebondissement sur rebondissement jusqu'à plus soif (oui, il en fait un poil trop, mais ma foi ça marche). Acteurs parfaitement dirigés, sens indéniable du rythme et du montage, goût assumé pour le spectacle, on en a pour son argent.

argo_fi1
Dommage que Affleck soit moins bon à la mise en scène qu'à l'écriture. Au bout de quelques minutes de cette caméra Louma hystérique, j'avoue que la nausée n'était pas loin. Tous les plans sont en mouvement, tous sont filmés en travellings incessants, très souvent complètement inutiles (pour éviter le champ/contre-champ classique, le gars tournicote comme un dingue, façon Lelouch, autour de ses acteurs, pour quoi faire ?), tout en ruptures de directions (gauche-droite, droite-gauche, haut-bas, n'en jetez plus), et c'est fatigant. Sa grande idée pour rendre la violence de la révolution est de s'immerger à l'intérieur de la foule et de filmer ça à l'arrache, "au hasard" : ça ne rend jamais ce que ça devrait rendre (l'aspect documentaire, pris au téléphone portable, presque, s'il avait existéà l'époque), c'est juste une démonstration lourdaude de savoir-faire. Dans ce souci de vérité constant, Affleck se trompe de choix : on s'en tape que l'acteur ressemble au vrai protagoniste (le générique de fin ridicule où tous les plans sont mis en parallèle avec les plans d'achive), il importait plus que le film soit "vraisemblable". Or, par schématisme, par crânerie formelle, par manque d'intelligence, Argo n'est qu'un film d'action un peu plus raffiné, et passe à côté du vrai film politique qu'il aurait pu être. Les yeux remplis, le cerveau vide.

argo

LIVRE : Vertige de Franck Thilliez - 2011

$
0
0

9782265093768Vertige, c'est une intrigue qui démarre au premier mot de la première page et se termine au dernier de la dernière, la garantie d'un rebondissement toutes les deux pages, l'assurance de passer les deux heures de train chiantes dans un oubli total du monde extérieur, et la promesse de garder votre cerveau à l'abri de toute sollicitation poussée ou risque d'usure : du bon gros thriller qui tâche, quoi, qui a dûêtre écrit grosso modo en trois jours une fois l'intrigue inventée, et d'une efficacité redoutable à défaut de quelque trace de littérature que ce soit. La littérature n'est certes pas ce qu'on demande à ce type de produit, qui est à celle-ci ce que la chips goût vinaigre-barbecue est à la gastronomie française : c'est pas bon, mais on finit tout le paquet jusqu'à la dernière miette.

Mais c'est pas bon.

Thilliez écrit vraiment avec le coude gauche, avec certes le mérite d'enlever toute trace de gras de son intrigue, mais aussi avec le résultat que tout ça se réduit parfois à un quasi langage sms. Sujet-verbe-complément, psychologie au vestiaire, crédibilité sa mère : le tout est de vous happer par les parties et de ne plus vous lâcher, avec l'espoir que votre fascination vous fera fermer les yeux sur le côté fast-food de la chose. Pourtant, le scénario, à force d'accumuler les coups de théâtre et les rebondissements à rallonges, finit par ressembler à un grand-huit assez vain. On ne croit presque jamais à cette rocambolesque histoire, pompée sur Saw ou sur Usual Suspects, tant elle est pleine des 8000 détails too much dont on la surcharge : un ex-alpiniste se retrouve enchaîné dans une crypte avec son chien, un jeune mec et un gars casqué dont la tête explosera s'il s'éloigne des deux autres ; il y a en plus deux 45 tours, un appareil photo, son chien, un cadavre défiguré, une lettre de sa femme, un sac poubelle, un flingue avec une seule balle, un thermomètre, ce genre de bidules dont on se dit que ça ne peut pas servir alors que si... Toutes les deux pages, donc, on ajoute un truc, le mystère s'épaissit et on se dit que si le gars ne nous pond pas une fin du tonnerre, on lui en voudra un peu quand même de nous faire poireauter comme ça. Bon, la fin, je ne vais pas vous la dire, je n'ai rien contre Thilliez non plus, mais disons qu'elle est un peu facile vue la complexité inutile de ces 300 pages de développement. BOn, allez, ne faisons pas la fine bouche non plus, disons que c'est une récréation légèrement honteuse mais agréable, et redonnez moi ce paquet de chips goût romarin-vanille-poulet braisé que je n'ai pas fini.

La Réunion : Terre d’Asile ou Terre hostile (2012) de Said-Ali Said Mohamed

$
0
0

vlcsnap-2012-12-09-11h47m10s187

Eh oui, le cinéma comorien existe… même s’il s’agit en la matière d’un doc d’une trentaine de minutes. Le cinéaste interroge des Comoriens installés à la Réunion (cadre de santé, artistes, étudiant, retraité…) pour savoir dans quelle mesure ceux-ci ont réussi à« s’intégrer » dans la société réunionnaise. Même s’il ne représente que 2% de la population de l’île, nombreux sont les témoignages (de personnalités comoriennes mais aussi réunionnaises) qui soulignent une certaine stigmatisation envers les Maore et les Comoriens - qui « volent le logement et le travail des autres », le discours est malheureusement connu. Malgré tout, certains ont réussi à dépasser cet obstacle en décidant une bonne fois pour toute que cette terre n’était point une terre d’exil, de transition mais bel et bien leur lieu de vie : rien ne pouvait les empêcher dès lors de faire partie intégrante de ce creuset de cultures et de faire leur trou (les paroles « décidées » - pour ne pas dire un poil rageuses - du militant assossiatif, de l’infirmière ou du choregraphe). Le réalisateur fait également un petit tout par les mosquées pour évoquer là aussi le rôle (de plus en plus) important que peuvent tenir les Comoriens au sein de la communauté musulmane. Les cadres et les lumières sont propres, les petites transitions entre les interviews joliment choisies, on ne peut que regretter l’absence d’image sur la « vie réunionnaise » en tant que telle, sur ces quartiers  où vivent justement ces différentes communautés…  Une immersion prévue pour le prochain film… ?

vlcsnap-2012-12-09-11h47m48s67

Mhaza Kungumanga (2006) de Mounir Allaoui

$
0
0

vlcsnap-2012-12-09-13h55m57s92

Le cinéma des Comores (même s'il est "diasporisé") existe bel et bien - remarquez la subtile transition avec l'article précédent -, c'est ce que nous montre ce fabuleux court-métrage de Mounir Allaoui et je ne dis pas cela parce que je le connais... uniquement gmailement, attention... Le cinéaste "met d'abord en images" (plan fixe superbement cadré, jeu sur la profondeur de champs, séquences hypnotique sur des corps, des visages, une main qui s'agite (celle de la conteuse au demeurant)) un conte qui narre simplement l'histoire d'une jeune fille à la recherche du prince charmant... Celle-ci tombera sur un monstre et aura toutes les peines du monde à s'en défaire. On lit cette histoire sans trop savoir encore où Mounir Allaoui veut vraiment nous mener... Finalement tout comme cette jeune fille qui a suivi son futur mari dans ce village inconnu... peuplé de monstres...

vlcsnap-2012-12-09-13h56m20s188

Peu à peu, entre la voix de la conteuse et la musique atmosphérique de Richard George émerge la voix d'un homme politique. La personne parle de son futur programme s'il est élu et l'on découvre finlement le visage de Sambi, l'ancien président des Comores. Ce dernier se lance dans toute une série de promesses concernant notamment la construction de maison en dur... Quand il se met à parler de merveilleuses machines pouvant fabriquer des briques et des tuiles à un rythme d'enfer, d'un budget défini à la louche, on sent tout de même déjà méchamment l'enfumage... La mouche qui n'a de cesse de tourbillonner autour de son visage n'aide en rien sa crédibilité comme si ces promesses étaient déjà mort-nées... Si les deux paroles, les deux histoires, celle de la conteuse et celle de l'homme politique, se font forcément écho, sont automatiquement mises en parallèle par le spectateur, certaines images découvertes en introduction (la construction d'une "paillotte", cette pluie torrentielle qu'aucune vaine parole n'arrêtera jamais, cette campagne...) prennent tout leur sens "a posteriori", illustrant toute la différence qui existe entre les "vains mots" de Sambi et l'éternelle réalité : une intelligente construction narrative faisant du film une sorte de boucle sans fin (à"l'image" des très beaux discours pré-éléctoraux qui ne se réalisent jamais mais auquel on est prêts à croire tous les cinq ans...) ; le travail sur l'image et le son, l'atmosphère musical ne sont pas sans faire penser au remarquable Disneyland de Des Pallières et ce n'est pas le moindre des compliments... A suivre, forcément...    

vlcsnap-2012-12-09-13h57m17s1

Viewing all 6655 articles
Browse latest View live